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La prostitution
22 janvier 2016

Prostitution: la pire loi qu'on puisse imaginer

Le Sénat débat lundi et mardi d'une proposition de loi réactionnaire et esclavagiste qui pénalise les clients Ce texte est un mauvais texte, c'est même le pire que l'on puisse imaginer pour les prostituées. Il n'est qu'idéologie. Nous avons affaire à des gens butés qui, au nom de leur idéologie, veulent faire croire qu'ils œuvrent pour le bien des femmes qui font le tapin. Mais sous couvert de vouloir nous faire du bien, ils ne vont nous faire que du mal.

Car ce n'est pas le travail sexuel en lui-même qui est violent, ce sont les conditions dans lesquelles il est exercé. Et cette proposition de loi qui vise à sanctionner les clients -l'amendement a été retiré en commission mais il est prêt à être réintégré quand la discussion retournera à l'Assemblée- n'aura pour conséquence que nous précariser encore davantage. D'autant que les sénateurs ont réintroduit le délit de racolage passif que l'Assemblée national avait supprimé.

Voyez la perfidie de la députée Maud Olivier qui illustre la pensée de tout le mouvement abolitionniste: elle sait parfaitement qu'elle ne peut pas interdire à une femme de se prostituer car cela porterait atteinte aux libertés fondamentales ; alors elle nous dit «oui, vous avez le droit de vous prostituer» mais personne n'aura le droit de recourir à vos services. C'est comme si l'on décidait de jeter l'opprobre sur tout ce qui ne plait pas moralement ou bien est nocif - la malbouffe, le tabac, l'alcool -et de condamner les clients de ces prestataires de services tout en leur disant qu'ils peuvent continuer à exercer, et surtout payer les charges inhérentes à leur activité.L'absurdité est totale.

Et au fond, que proposent ces gens pour nous? Les migrantes qui n'ont pas de papiers en obtiendront provisoirement pour six mois ; mais après, que vont-elles devenir? Et plus largement, pour nous qui gagnons notre vie légitiment avec nos prestations, qu'ont-ils prévus? Comment comptent-ils nous rendre l'équivalent de ce qu'ils vont nous faire perdre? Tout simplement, ils ne peuvent rien faire car ils n'en ont pas les moyens.

Pour revenir à la motivation de ce texte, il est évident (et la plupart des rapports qui sont faits dans le monde le prouvent), plus on interdit, plus on marginalise, plus on insécurise. Bien sûr qu'il faut lutter contre le proxénétisme et la traite des femmes, c'est même une priorité. Mais il est évidemment possible de le faire sans s'attaquer à la prostitution ; c'est même comme ça qu'il faut faire. Si la législation protège les travailleuses du sexe, il sera plus facile pour les filles de se libérer de leur proxénète. Elle pourra lui dire, "c'est fini, je te dénonce et je pourrai continuer à travailler à mon compte car la loi m'y autorise".

Dans ce monde idéal, nous, les travailleuses du sexe qui payons des impôts sur ce que nous gagnons (en tant que travailleuse indépendante, c'est 33% de mes revenus) nous pourrions nous organiser entre nous, sans lien de subordination entre les filles, avec une sécurité et des lieux adaptés. C'est ce qui se fait en Nouvelle-Zélande où les autorités ont prolongé un test d'autogestion de prostituées qui travaillent à trois ou quatre dans un même lieu. En France, on pourrait imaginer une Scop avec des intérêts pour les filles qui la constituent.

Mais pour cela, il faudrait arrêter de jeter l'opprobre sur le travail sexuel et les prostituées. Malheureusement, la fin de l'idéologie n'est pas pour demain.

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